FOCUS LES CHEMINS DE TRAVERSE – saison 4
J comme…
Maurice JOURNEAU
Compositeur français Né le 17 novembre 1898 à Biarritz Mort le 9juin1999 à Versailles
Principales compositions : De la musique pour orchestre dont Midi aux champs, Pastorale op.27 (1943) ; Des œuvres de musique de chambre, dont un sextuor à cordes, des quintettes avec ou sans piano, un quatuor à cordes et un à vent, un trio avec piano, des pièces en duo pour divers instruments avec piano… ; Quelques pièces de musique sacrée avec orgue ; Un large choix de partition pour piano.
Directeur d’hôtels de luxe sa vie durant, par atavisme familial – son père exploitait plusieurs établissements à Biarritz et San Sébastian – autant que par opportunité économique, Maurice Journeau fut indéniablement en musique, au sens noble que lui accordait le XVIIIe siècle, un « amateur ».
Après avoir appris le piano dans son enfance, il poursuivit de 1920 à 1922 des études de composition à l’Ecole Normale de Musique de Paris, où il bénéficia de l’enseignement de Nadia Boulanger et de Max d’Ollone. Ses premières compositions, essais d’étudiant, furent publiées par la maison d’édition Sénart. S’il choisit finalement de reprendre l’activité paternelle plutôt que de vivre de son art, il continua à composer suivant les conseils de ses professeurs, conservant ainsi sa liberté et sa fraicheur d’écriture.
Rétif à toute espèce de mondanité, modeste, attentif aux autres et d’une grande humanité – se mettant au piano le soir dans son appartement parisien, il veillait à jouer doucement pour ne pas gêner le voisinage, et développa ainsi un toucher velouté – Journeau était en même temps un musicien cultivé. Maître de son art, et ouvert aux évolutions stylistiques, il jetait un regard constamment curieux sur les multiples courants musicaux de son époque, tout en restant à l’écart des chapelles.
Lui pour qui « une bonne musique est une musique qui touche à la fois le cœur et l’intelligence », posait sur son piano aussi bien les partitions de Bach que les Sonates de Boulez, vénérait Ravel, dont on sent l’influence dans ses premières œuvres, mais conservait son indépendance vis-à-vis des chapelles et des modes. Jugeant « très important de se renouveler », il étudia les traités de Schoenberg et intégra les principes du sérialisme à compter des années 70, sans pour autant se départir de son langage personnel, ancré dans le style français du début du siècle, « moderne modéré » comme il le qualifiait lui-même.
Cette indépendance, aussi bien vis-à-vis de son art que du monde musical, se traduisit aussi par un penchant marqué pour les formes libres –impromptus, préludes, caprices- où son imagination put s’exprimer sans entrave formelle, et dans la rareté des indications interprétatives portées sur ces partitions, laissant aux interprètes une grande souplesse d’approche.
Son œuvre est marquée par les lieux où il vécut, de Biarritz à San Sebastian en passant par Nice où, tout jeune marié, il partit diriger l’Hôtel Windsor de 1926 à 1936. Là, il collabora à plusieurs reprises avec le violoniste Gil Graven, la majeure partie des œuvres de cette époque étant dédiée à l’instrument. Ses compositions d’avant-guerre sont empreintes de cette clarté solaire et des paysages maritimes qui constituèrent une source d’inspiration privilégiée (Nuits Basques, Aux Rivages Méditerranéens, Marine). Mais son œuvre traduit également son attachement à sa famille et au monde de l’enfance (Pièces enfantines, Scènes à jouer aux enfants, Suite pour les Jeunes, …).
À compter de 1936, Maurice Journeau s’installa définitivement à Paris où il poursuivit son œuvre discrète, se consacrant principalement au piano et à la musique de chambre, avant de s’orienter vers la musique sacrée à la fin de sa vie. Estimant « avoir suffisamment écrit », il cessa brusquement de composer en 1984, laissant en tout plus d’une centaine d’œuvres, dont la plupart encore inédites et le sentiment que ce compositeur attachant n’a peut-être pas reçu l’accueil que sa musique mérite.
Patrice Mercier
Nota : les citations et anecdotes sont tirées d’une conférence donnée le 18 novembre 2018 par Chantal Virlet-Journeau, fille du compositeur, dans le cadre du Festival Piano au Musée Würth à Erstein.
Pour prolonger l’écoute : Hormis Skarbo, qui a consacré deux albums majeurs à sa musique de chambre (Ensemble Opus 41) et à sa musique pour piano (T. Betz-J. Micault), aucun label ne s’est réellement intéressé à l’œuvre de Maurice Journeau. L’enregistrement du quatuor op.11 (Quatuor de Chartres/REM) est quasi introuvable, tout comme celui de la sonate op.6 (C. Cousin/F. Goïc). Reste la Fantaisie dans une anthologie de musique française pour violon et orgue (A. Robert/J. Boucher/XXI) et l’album Canticum Novum (B. Leblanc/J. Boucher/SMD) qui ne présente, parmi diverses mélodies sacrées, que sa Prière à la Vierge. C’est à peu près tout !
RETROUVEZ MAURICE JOURNEAU DANS LES CHEMINS DE TRAVERSE SUR ACCENT 4, LE 11 DECEMBRE